Clématites ou aubergines ?

Les clématites sont en fleur et elles me font irrémédiablement penser à la très belle toile de Matisse : Intérieur aux aubergines. Ce grand tableau fait partie des Intérieurs Symphoniques de Matisse, ainsi baptisés par Alfred Bahr, et c’est un chef-d’œuvre de peinture décorative, réalisé à Collioure durant l’été 1911. 

La toile est parcourue d’un motif tapissant toute sa surface : les clématites à 5 pétales qui prolifèrent et évincent les aubergines qui donnent le titre à l’œuvre - d’ailleurs sont-elles vraiment le sujet de l’œuvre ? L’espace est traité sans hiérarchie et l’ambiguïté spatiale est à son comble alors que les écrans/cadres - sujet cher à Matisse - se succèdent : fenêtre, paravent, miroir … 

Cette grande toile est en outre peinte à la détrempe, qui donne une grande matité à l’œuvre et la place en regard de la grande peinture murale.

Michael et Sarah Stein l’achètent quelques semaines après le retour de Matisse de Collioure. Michael et Sarah vouent une grande fidélité à Matisse, tandis que Léo et Gertrude, les frère et sœur de Michael, choisissent Picasso. Durant la Première Guerre Mondiale, les Stein doivent rentrer aux USA et se défont de certaines œuvres. Matisse rachète alors son tableau. En 1922, son épouse Amélie et sa fille Marguerite donnent le tableau au Musée de Grenoble. Tous les autres Intérieurs Symphoniques sont partis à l’étranger (MoMA, l’Ermitage, Pouchkine…) et Matisse estime qu’il faut que l’un d’entre eux reste en France. Comme les pouvoirs publics ne l’achètent pas, il le donne via André Farcy, conservateur du musée et très défenseur de l’art moderne. C’est alors le seul musée à regarder ses contemporains et c’est aujourd’hui une des plus belles collections d’art moderne d’Europe. 

Henri Matisse, Intérieur aux aubergines, 1911, détrempe sur toile, 212 x 245 cm, Musée de Grenoble

Henri Matisse, Intérieur aux aubergines, 1911, détrempe sur toile, 212 x 245 cm, Musée de Grenoble

Détail

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